Retrouvailles et découvertes

A toute première vue, ces deux termes, retrouvailles et découvertes, nous ont semblé exprimer une opposition. Mais au fur et à mesure que nous avons pris connaissance des renseignements fournis par les artistes, nous avons dû changer d’avis. Des découvertes, il en surgit aussi dans des retrouvailles. Deux des trois artistes qui exposeront leurs œuvres en ce début de la nouvelle année ont déjà exposé à La Primaire. Mais quelle évolution! Quelles découvertes!

Il en va ainsi de l’artiste qui présentera ses travaux dans l’Espace Yves Sandrier. Il s’agit de Coé Blanchard, artiste que La Primaire se réjouit de retrouver dans ses murs. Il a fallu remonter bien loin pour repérer son nom dans la longue liste des artistes ayant présenté ici leurs créations, très exactement à la saison 1994/95. Sous le titre «techniques mixtes», alors fort apprécié, elle présenta ses œuvres à côté de cellesde Marie-Anne Nahas-Béguin, hélas décédée depuis, et de Brigitte Crittin. Après un si long temps, on ne s’étonnera donc pas que les retrouvailles aillent de pair avec des découvertes. La principale tient au fait que, depuis trois ans, Coé Blanchard a choisi de s’initier au monde de la gravure. Cela lui permet, nous dit-elle, de «poser un regard nouveau sur son travail». La Primaire aura donc l’honneur, si nous comprenons bien les choses, d’être le lieu de la première exposition de ces travaux récents. L’artiste a conçu son exposition comme une invitation à un voyage, sur la route des souvenirs. A l’origine de ses gravures se trouvent en effet ses carnets de croquis, témoins des histoires qu’elle souhaite partager avec les visiteurs. En particulier un voyage au Costa Rica, avec, nous dit-elle, «la découverte d’une nature incroyable».

Le second artiste que la Primaire accueille pour la deuxième fois est Gheghe Alexandru Bulla. Sa trajectoire est quelque peu différente de celle que nous venons d’évoquer. Elle semble toutefois  avoir trouvé maintenant une ligne tout à fait ferme. La manière dont l’artiste en parle résonne comme venant d’une expérience désormais vigoureuse et profonde. La sculpture est devenue pour lui un mode d’expression de plus en plus personnel, surgissant du plus profond de lui-même. Qu’on écoute cette manière d’en parler: «Un déferlement de créativité m’a poussé à transposer mes ressentis en quelque chose de physique.» Deux réalités sont à noter. D’abord, le choix de la matière: «Pour mes sculptures, j’ai choisi la terre, parce que cette matière m’offre la possibilité d’une création spontanée et répond à mon impatience de voir une idée se matérialiser.» Un chemin a toutefois été frayé vers une expresion plus travaillée, qu’il appelle «oft cubisme». D’autre part, le fait que, depuis deux ans, l’artiste travaille au sein de  l’Association «Terre et modelage», sous le regard de deux «maîtres» et «guides»: Frédéric Roman et Milos Jiranek.

En troisième lieu, la découverte pure. Elle vient de la part de Fabrice Lombard, artiste conchois, et le terme qui la désigne n’est autre que «peintographie». De quoi s’agit-il? Ecoutons ce qu’en dit l’artiste lui-même: «Les œuvres sont des photographies aériennes prises avec un drone, puis numériquement transformées en peintures, à l’aide de différents logiciels et finalement imprimées sur toile. Les peintographies représentent la région de Conches, le Salève ainsi que la Rade de Genève.» L’origine de cette manière de travailler? «Passionné depuis l’enfance par la nature et le modélisme, puis, plus tard, par la photographie, je trouve dans la peintographie le moyen d’allier ces trois passions en une expression artistique. Cette technique offre un rendu surprenant, subtile mélange d’une peinture classique avec les détails d’une photographie. Le travail numérique des images permet une grande latitude dans le rendu souhaité des œuvres.» Des échanges avec l’auteur de ces peintographies seront, à coup sûr, fort intéressants.

 

Flurin M. Spescha, début janvier 2019